Alors que je venais d’installer Mandriva, et de comprendre comment modifier /boot/grub/menu.lst, je devais reporter ces modifications le plus vite possible, du moins avant de les oublier. Pas le temps de mettre à jour la liste des serveurs et d’installer emacs avec urpmi… D’où une nécessité absolue d’utiliser Vi (VIsual editor).

Vi est un éditeur très puissant et très souple, en mode console, installé par défaut sur toutes les distributions de Linux. Mais sa puissance est malheureusement dérisoire comparée à sa difficulté d’utilisation. Ses concepteurs ont déployé toute leur imagination pour le rendre inutilisable : des raccourcis clavier impossibles à mémoriser, un mode d’utilisation qui ne semblerait intuitif qu’à un psychopathe, une convivialité réduite à un point qui dépasse votre entendement, tous les ingrédients ont été réunis pour rendre fou tout utilisateur normal. Seul un carteron d’inconditionnels (boutonneux, appareil dentaire, lunettes à triple foyer, pull années 70 avec col en V) accepte de subir l’inutile et excessive complexité de Vi.

Face à la question Vi ou la mort, que répondre ? On vous propose la mort sous deux formes différentes ! Seule une chance de survivre à Vi pourrait vous amener à le préférer à la mort. En même temps, seule une alternative comme la mort peut vous obliger à l’utiliser. Je vous propose dans ces quelques chapitres des indications qui vous aideront, je l’espère, à sortir vivant de cette épreuve. Cependant je ne vous garantis pas que vous serez intact, des mois de thérapie intensive sont à prévoir si vous n’abandonnez pas maintenant.

L’épreuve de self-control

L’accomplissement de la première étape vous demandera toutes vos ressources. Vous devrez être capable de vous maîtriser pleinement et de garder votre sang-froid qui qu’il arrive. Si jamais vous ne vous en sentez pas capable, faites demi-tour pendant qu’il en est encore temps, c’est-à-dire maintenant.

Si malgré mes avertissements itérés vous avez décidé de continuer, alors ouvrez un terminal et à vos risques et périls saisissez la commande :

vi test

Un éditeur vide devrait apparaître sur la console. Ne vous laissez pas accabler par sa laideur, et gardez votre calme. Essayez maintenant de saisir du texte… Comme vous le constatez rien ne se passe.

Surtout : gardez votre calme ! Vous devez résister à l’envie de frapper l’écran avec votre clavier ! Même si vous ne comprenez pas pourquoi ce fichu éditeur ne veut pas faire ce que vous lui demandez.

Si vous arrivez à lire ce message, c’est que vous n’avez pas encore détruit votre ordinateur, vous pouvez (et devez) donc passer à l’épreuve suivante.

Le mode insertion

Vous avez lancé Vi, et aucune indication sur la façon d’en sortir n’apparaît. Vous n’avez maintenant aucune issue. Le seul moyen d’éviter le redémarage est de lire la suite de cet article.

Il existe deux modes en Vi,

  • Le mode insertion : pour modifier le texte
  • Le mode command : pour éxecuter les opérations sur fichier, ou de recherche, format, etc.

Dans tout éditeur digne de ce nom, le mode par défaut est le mode insertion. Mais la volonté irrépressible des concepteurs de Vi à accumuler une pléthore de difficultés inutiles les a poussé à adopter le mode command par défaut. C’est pour cela que lorsque vous écrivez, rien ne se passe. Maintenant, je vais vous donner quelque chose qui n’a pas de prix : les clés qui permettent de passer d’un mode (ou plutôt d’un monde) à l’autre.

  • insertion -> command : esc
  • command – > insertion : i

Une fois traduit en français, cela signifie qu’il suffit de taper i pour passer en mode insertion, et là cet éditeur de mes deux acceptera enfin d’écrire ce que vous lui demandez d’écrire. Une fois que vous serez lassé d’écrire, saisissez esc pour repasser en mode commande. Pour quitter vi en enregistrant le fichier, saisissez la commande :

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